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Rolex Series: l’heure de gloire… Vraiment?!

L'European Tour lance les Rolex Series pour la saison 2017. Objectif: proposer plus d'argent sur les tournois pour développer le golf mais est-il vraiment le gagnant de l'histoire ?
Keith Pelley- European Tour -Rolex Series
Keith Pelley

En 2015, quelques mois après sa nomination en tant que patron du Tour Européen, Keith Pelley avait annoncé son souhait de proposer une alternative viable au PGA Tour. En clair, il n’était plus question que le circuit dont il avait désormais la charge soit vu comme une “2ème division” par les joueurs. Enfin, essentiellement ceux du haut du top mondial.

Outre-Atlantique, les dotations des tournois de la saison régulière (exception faite des Majeurs et des WGC) oscillent entre 3 M$ et 9M$ si on retire de la liste The Players qui offrira 10,5M$ en 2017. Pour la saison 2017 qui vient de commencer sur le PGA Tour, 16 tournois proposent des Money Prize supérieurs ou égaux à 7 M$.
Sur l’European Tour, lors de cette saison 2016 qui vient de se terminer, il n’y aura eu que les 3 tournois des (ex-)Finals Series, le Turkish Open, le Nedbank Challenge et le DP World Tour à plus de 7 M$.

Le nouveau jackpot des Rolex Series

Mais ça c’était avant!
Avant cette annonce, mardi dernier (le 15 novembre), d’une Ligue des Champions du golf qui proposera assurément 7 tournois très fortement dotés (≥7 M$) dès l’année prochaine. La liste devrait même en contenir sans doute 8 (on pense à l’Open de France), peut-être 9 au final en 2017 pour atteindre 10 tournois à l’horizon 2018.

À ce jour, ce sont donc le BMW PGA Championship (5,3 M$ en 2016), l’Irish Open (4,2M$), le Scottish Open (4M$) et l’Italian Open (3,1M$) qui vont bénéficier de cette injection de dollars pour mieux séduire les grosses cylindrées mondiales. Merci Rolex!

D’abord, à défaut d’un retour au source permanent des McIlroy, Rose et autres Stenson, l’objectif du patron de l’European Tour est bien d’éviter que les stars montantes européennes, tels les Fitzpatrick, Pieters et consorts, ne cèdent à l’appel des billets verts du PGA Tour.

Mais pas seulement.
Cette création des Rolex Series a pour but d’être suffisamment attractive pour faire voyager les autres stars internationales vers le continent européen plus souvent. Pari intéressant même s’il reste encore à prouver.
Cependant, le calendrier européen est aménagé en conséquence. 2017 proposera sur 3 semaines consécutives l’Irish Open puis le Scottish et enfin The Open. Un brelan anglo-saxon qui dépassera au total les 22 M$ de dotation, avec l’avantage supplémentaire que les 2 premiers tournois offriront une belle préparation pour le 3ème, en terme de type de parcours et de similarités de conditions de jeu.

À titre de comparaison, sur le circuit américain, The Open sera précédé du Greenbrier (7,1 M$) puis du John Deere Classic (5,7 M$) sur des parcours qui ne sont en rien des Links. Suffisant pour faire pencher la balance en faveur de l’Europe?

Un tour européen à 2 vitesses

À chaud, on ne peut que s’enthousiasmer à l’idée de voir les meilleurs joueurs du golf au monde plus souvent en Europe, et notamment à Paris si l’Open de France rejoignait effectivement les Rolex Series.

Mais le revers de la médaille est la difficulté sous-jacente pour tous les autres, tous ces joueurs confirmés ou en devenir, ceux qui font le métier et qui vont devoir batailler un peu plus encore pour tenter se faire une place au soleil. Ceux qui ne constituent pas l’élite d’aujourd’hui.
Car il y en aura fatalement moins pour eux, des places disponibles au départ, dès lors que les meilleurs seront présents plus fréquemment (sans parler d’éventuels champs limités). Ils seront donc beaucoup à se partager peu sur tous les autres “petits” tournois de la saison.

Avec cette nouvelle donne, Keith Pelley vient surtout d’offrir une grosse cerise au gros gâteau que se partageaient déjà ses membres VIP. Au terme de cette saison, Henrik Stenson, par exemple, vient de recevoir un bonus de 1,25M$ en tant que vainqueur de la Race to Dubaï 2016. Une jolie somme qui s’ajoute à ses 4M$ de gains par ailleurs.
Sachant que ces Rolex Series ne remplacent pas la Race To Dubaï et n’ont donc aucun enjeu comptable autre que celui lié au porte-monnaie. Hélas c’est dans l’air du temps, les riches vont avoir l’occasion de devenir encore plus riches.

Pour compenser, la Race to Dubai se retrouve adossée d’une Access List dès cette nouvelle saison qui débutera le 1er décembre.
Un nouveau classement qui ne tiendra pas compte des gains accumulés dans les Rolex Series, et autres gros rendez-vous de la saison. Les 10 premiers de cette Access List qui ne sont pas dans le Top100 de la Race to Dubaï, classement qui lui comprend tous les gains de tous les tournois, conserveront leur carte la saison suivante… ^^
(Bref, du boulot en perspective pour Gurwann, notre spécialiste sur ce blog!)

Cette nouvelle organisation va donc offrir deux classements et des tournois qui rapportent des points dans l’un mais pas dans l’autre. En dehors d’offrir une complexité supplémentaire à la compréhension du circuit pour le commun des amateurs de golf, l’European Tour ne vient-il pas tout simplement de créer lui-même une “2ème division” en son sein avec les joueurs des Rolex Series et les autres?!

Et le golf dans tout ça?

Par ailleurs, on pense aussi aux autres tours sur lesquels des centaines de golfeurs et golfeuses auraient certainement apprécié de bénéficier d’un soutien financier supplémentaire pour vivre un peu mieux. À titre d’infos, le Challenge Tour propose une dotation aux alentours 10 M$ pour l’ensemble de la saison et celle du Ladies European Tour avoisine les 7m$ environ (hors British Open et Evian Championship)… Soit l’équivalent d’1 tournoi à 1 tournoi et demi des Rolex Series.

Dans un autre registre, on pourrait aussi avoir aussi un Open de France qui, par son nouveau statut, limite les possibilités de participation des jeunes talents tricolores. Et quand on sait, au travers du récit de leur expérience, ce que cela peut représenter dans leur développement personnel, c’est une chance de moins dans leur carrière.

Plus d’argent, plus de stars pour espérer plus de rentrées d’argent dans les caisses de l’European Tour qui, rappelons-le, a affiché fin 2015 un déficit supérieur à 9 m€.
Forcément les droits TV vont grimper et le golf sera toujours confiné en retour à des chaines payantes.
Et ne nous y trompons pas, les prix des billets d’entrée sur les tournois vont aussi s’envoler, au détriment de l’accessibilité pour les moins fortunés (mais tout aussi passionnés) et donc ré-enfoncer le clou de ce sport de riches.

On est d’accord l’élite tire les autres vers le haut, l’élite attire et fait rêver les plus jeunes d’une réussite à la fois sportive et sociale.
On l’observe avec le football évidemment, mais n’oublions pas que ce sport s’appuie sur une masse d’amateurs et de licenciés en progression globale depuis des décennies.
Ce n’est pas le cas du golf. Depuis 5 ans, la réalité est celle des licenciés en baisse et des parcours qui ferment…

Rolex Series - vraie (fausse) bonne nouvelle
Evolution du nombre de golfeurs licenciés en Europe de 1990 à 2015

Le golf a besoin de nouveautés, de toucher plus de jeunes, de poursuivre son développement auprès du public féminin, bref de faire grossir la masse sur laquelle l’élite pourra s’appuyer pour, à son tour, attirer encore plus de joueurs et joueuses.

Keith Pelley en a conscience, déclarant que “le golf devait se réveiller et être plus fun“.

Pourtant dimanche, lors du dernier tour de cette finale du circuit européen à Dubaï, on a observé un rythme de jeu inversement proportionnel à l’agacement qu’il génère chez le téléspectateur, une réalisation télé toujours aussi monotone, et qui privilégie à outrance les anglais, ou encore une finale qui n’en était pas vraiment une avec le sacre de Stenson qui passe plutôt inaperçu au vu de la formule actuelle. Bref, l’European Tour est vraiment bien loin du compte.

Et le sentiment domine que ces Rolex Series n’apportent toujours rien d’innovant pour répondre aux préjugés et constats récurrents qui attristent régulièrement tous les amoureux du golf.

Mais après tout, ce n’est pas nouveau, l’argent ne fait pas le bonheur.

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