La victoire au Masters de Sergio Garcia est une très bonne nouvelle pour le golf mondial. Et pour ses nombreux fans, qui ont tant souffert par le passé…
Même ses plus fervents supporters (dont l’auteur de ces lignes fait partie) n’y croyaient plus vraiment. Sergio Garcia semblait destiné à subir le même sort que Colin Montgomerie ou Lee Westwood, à savoir réussir une immense carrière de golf, sans remporter un tournoi du Grand Chelem. Au fameux classement du “Best players who never won a major” cher aux médias anglosaxons, l’Espagnol figurait toujours dans le top 3.
Et puis le miracle est arrivé. Après 73 départs en majeurs sans victoire, le natif de Borriol a triomphé lors de sa 19ème participation à Augusta, le majeur où on l’attendait le moins. Sur un parcours favorable aux “drawers” alors qu’il préfère le “fade”. Sur les greens les plus tourmentés de la terre alors que le putting (en particulier les petits putts si compliqués à Augusta) est le supposé point faible de l’héritier de Seve Ballesteros. Et à la bagarre, en revenant in extremis sur les talons de Justin Rose, alors que tant de dimanches après-midi lui ont été fatals au British, à l’US Open ou à l’USPGA, dans des duels rapprochés.
Oubliée donc, la virgule de Carnoustie en 2007.
Effacée la balle dans l’eau du trou n°16 à l’USPGA en 2008. Evaporés les regrets d’une sortie de bunker manquée à Liverpool en 2014, alors qu’il semblait en mesure de priver Rory McIllroy d’un premier “British”.
Et il n’y a pas eu que des majeurs qui ont tourné au crève-cœur pour Sergio. On se souvient de ses deux balles dans l’eau au n°17 du Players Championship 2013, face à son “ennemi intime” Tiger Woods…
Sergio Garcia, l’équipier modèle
Sa réputation de joueur trop émotif, voire fragile dans les instants décisifs, était grandissante. Et ce, malgré le fait que Garcia est l’un des plus grands joueurs de l’histoire de la Ryder Cup, considérée par beaucoup comme l’épreuve où la pression est la plus forte. Il y totalise 5 victoires d’équipe et 20 points individuels. Nick Faldo, l’européen le plus prolifique de l’histoire (25 points), pourrait un jour être dépassé.
Equipier parfait, il a joué avec une petite dizaine de partenaires en double. De Jesper Parnevik à Rory en passant par Ian Poulter, tous ont bénéficié de son sens du collectif et son jeu flamboyant.
“Je ne m’étais jamais senti aussi calme dans un tournoi majeur” Sergio Garcia
En compétition individuelle, c’est vrai, son approche mentale n’a pas toujours été exemplaire. Mais à 37 ans, “El Nino” a vaincu ses démons au terme de ce qui restera comme l’un des plus beaux tournois du Grand Chelem de ces 20 dernières années.
Dès le début du tournoi, il avait expliqué se sentir “beaucoup plus calme et apaisé” pour ce Masters 2017. Au plus fort de la bagarre face à Rose, on a vu dans son regard celui qu’il affiche en Ryder Cup. Habité, déterminé. Pourquoi aujourd’hui ? La maturité ? Son futur mariage ? Peu importe. Ce qui est sûr, c’est que cette victoire fait plaisir à beaucoup de monde. Pas seulement à lui.
Des coups de génie
Pourquoi tout le monde aime Sergio Garcia (ou presque)?
D’abord parce que c’est un joueur immense, formidable driver, grand joueur de fers, au petit jeu flamboyant. Depuis près de 20 ans, ses coups de génie ont fait le tour du monde. Je vous en propose ici un petit florilège.
– USPGA Championship 1999, Medinah, le fameux slice au pied de l’arbre
– Wells Fargo Championship 2013, chip de 1,50m par dessus une marque de clou
– Bay Hill 2013, recentrage depuis le haut d’un arbre
– Ryder Cup 2014, sortie de bunker rentrée
– BMW International 2016, un petit trou en un bien sûr
Mais Sergio Garcia n’est pas qu’un grand joueur. Il est aussi élégant sur le parcours, toujours bien apprêté, même si lors de ses jeunes années, il a tenté quelques costumes un peu fous (voir sa tenue de canari au dernier tour du British Open 2006 (photo 6 dans le lien), ce qui lui avait valu les sarcasmes de son partenaire un certain Tiger Woods .
Il est aussi réputé pour son fair play, à l’image de ce geste de classe lors des championnats du monde de match play en 2014 face à Rickie Fowler (putt donné à l’Américain à 6m du trou car Sergio estimait avoir pris trop de temps lors de son trou précédent.
Il est surtout, et enfin, ami avec de très, très nombreux joueurs, et c’est un signe dans un milieu ultra concurrentiel. Passons vite sur ses démêlés avec le Tigre, où l’Espagnol s’est égaré dans des déclarations malheureuses. Luke Donald, Bernd Wiesberger, Adam Scott font partie de sa garde rapprochée. Pendant et après son duel face à Justin Rose, la Twittosphère du PGA Tour s’est enflammée pour l’encourager et le féliciter. Le Twitt de Rory McIlroy au cœur de la bataille en dit long sur la popularité de l’homme.
Let him have one…. VAMOS!!!
— Rory McIlroy (@McIlroyRory) April 9, 2017
Même Tiger Woods, pas rancunier, y est allé de son petit mot.
Congrats @TheSergioGarcia. Well earned.
— Tiger Woods (@TigerWoods) April 9, 2017
Cette victoire au Masters, le jour des 60 ans du regretté Seve, à quelques semaines du mariage d’un homme qui a collectionné les conquêtes mais qui a aussi eu le cœur brisé plusieurs fois, est une très belle histoire. Les “Vamos Sergio” ne seront plus jamais des cris d’encouragement un peu désespérés.
Vivement le prochain British. Vivement la Ryder Cup 2018. Señor Garcia n’a sûrement pas fini de nous faire vibrer.