crédit photo à la une : Alexis Orloff / FFGolf
La saison touche à sa fin. Supporters en tête, suivis de très près par la Fédération Française de Golf et de bien plus loin par les médias en général, on attendait mieux de cette année 2018. En tout cas, plus. Au lieu de faire briller le golf tricolore, la Ryder Cup a semblé l’éclipser en mettant en exergue son manque de résultats et de joueurs (ses) encore loin du Top mondial. Mais en fait, le golf français n’est-il pas juste à sa place ? Celle d’attendre avec impatience la locomotive qui saura l’emmener plus haut, à l’instar de quelques uns de ses voisins européens.
Il n’y avait pas de Français parmi les sélectionnés de Thomas Bjørn en Ryder Cup. Nombreuses sont les mauvaises langues qui s’en sont moquées, incluant les médias qui ont trouvé un angle qui leur allait bien pour parler de golf. Le constat était juste : pour la première fois dans l’histoire de la Ryder Cup, le pays qui accueillait la compétition n’y avait aucun représentant parmi les joueurs sélectionnés (si on excepte les gallois en 2010 – NDLR).
Pourtant, on aurait aussi pu mettre l’accent sur la première fois qu’un pays sans culture golfique réussissait à accueillir la plus grande compétition au monde de ce sport. Mais, si on s’en tient à l’aspect purement sportif, avouons-le, c’est bien mal connaître le golf et le niveau qui est celui des français à l’échelle mondiale pour persifler sur le sujet.
Car au final, il n’y a pas eu de surprise. Ni bonne, ni mauvaise d’ailleurs. Depuis la blessure annoncée mi-avril dernier de Victor Dubuisson, la France savait qu’elle venait de perdre sa seule vraie chance d’avoir un représentant dans l’équipe européenne. Seul Français à jamais s’être hissé dans le Top20 mondial (17e en 2015), le cannois reste une exception. Celui dont le talent fonctionne à temps plein possède aussi, on le sait, une envie plutôt branchée sur l’alternatif, même si ce forfait survenait bien malgré lui.
Si l’on place arbitrairement la barre de l’excellence au Top50 mondial (parce qu’en général qualificatif pour l’ensemble des grands tournois de la saison) et celle des très bons joueurs au Top100. Chez les hommes, la France ne possède plus donc à ce jour qu’un seul très bon joueur et de nombreux bons joueurs.
Faisons un petit tour d’horizon avec quelques uns de nos voisins européens, en se limitant pour l’exercice au Top500 mondial :
Top50 | Top100 | Top200 | Top500 | |
France | – | 1 | 4 | 13 |
Allemagne | – | – | 1 | 8 |
Angleterre | 7 | 11 | 21 | 40 |
Autriche | – | – | 1 | 3 |
Belgique | – | 1 | 3 | 3 |
Danemark | 1 | 2 | 3 | 5 |
Espagne | 3 | 5 | 6 | 13 |
Irlande | – | 1 | 3 | 4 |
Italie | 1 | 1 | 2 | 6 |
Pays-Bas | – | – | 1 | 2 |
Suède | 2 | 3 | 5 | 19 |
La France offre un réservoir intéressant de bons joueurs mais il lui manque son leader comme peuvent (ou ont pu) l’avoir l’Espagne, la Suède ou l’Italie. Qu’il s’appelle Seve Ballesteros, Robert Karlsson (ou plus vraisembablement Annika Sörenstam chez les suédois), ou récemment Francesco Molinari, ces nations ont su se hisser parmi les meilleurs grâce à l’éclosion d’un champion. Ce joueur, ou cette joueuse, qui ouvre la voie en faisant passer le message à ses compatriotes que LA victoire est possible, qu’il faut croire en sa bonne étoile et acquérir la confiance qui va avec.
Tout vient à point…
La “faute” aux Van de Velde, Levet, Havret et Dubuisson qui sont passés si près d’un succès significatif et qui auraient gonflé notre coeur de supporter. Alors oui, ce français, on l’attend. Et pourtant.
Après-guerre, il a fallu attendre 1979 pour voir un européen non britannique gagner un Majeur (Seve Ballesteros avec The Open). Depuis, en 40 ans, ils ne sont que 7 joueurs européens continentaux à avoir gagné au moins l’un des 4 Majeurs.
Francesco Molinari a attendu 14 ans de professionnalisme pour une première victoire sur le PGA Tour puis un Majeur. Depuis 30 ans, la Suède a sorti régulièrement des super joueurs mais le premier Majeur chez les hommes date seulement de 2016 avec Stenson, pourtant passé professionnel 18 ans avant. Malgré un Ballesteros ou un Olazabal comme précurseurs, Sergio Garcia a joué 74 tournois du Grand Chelem avant d’en gagner un (Masters 2017) à son tour.
L’histoire n’a donc pas encore tourné favorablement pour les bleus mais en y regardant de plus près, on pourrait se montrer optimiste. Sur les 10 dernières éditions de la Ryder Cup, 3 Français ont été sélectionnés, soit 3 de plus que les 10 éditions qui ont précédé.
Sur l’European Tour, il faut remonter à 2010 pour trouver une saison sans victoire française. Depuis 2011, 8 tricolores différents ont gagné à 15 reprises. Seules l’Angleterre, l’Espagne et la Suède ont fait mieux alors que l’Allemagne va, elle, vraisemblablement enchaîner une 4e saison consécutive sans nouvelle ligne à son palmarès, et ce, malgré ses fers de lance qu’ont été Langer et Kaymer.
Sur le Challenge Tour, Victor Perez dimanche dernier en Chine a signé la 10e victoire d’un bleu au cours des 3 dernières saisons, cela représente 1 titre tous les 8 tournois en moyenne. On ne décompte que les anglais avec un meilleur ratio.
Chez nos féminines, Patricia Meunier-Lebouc avait déjà ouvert la voie avec une victoire en Majeur (Kraft Nabisco 2003). Ces 2 dernières saisons, on comptait souvent 5 Françaises sur le LPGA. Les tricolores engrangent des victoires chaque année sur le Ladies European Tour (2 en 2018 alors qu’il n’y a eu que 14 tournois joués). En 15 éditions de Solheim Cup, seulement 3 d’entre elles (1992, 1994 et 2011) n’ont comporté aucune Française.
Ne nous y trompons pas. Il est difficile d’être la crème sur le gâteau, et il est encore plus compliqué de se maintenir au sommet. L’histoire de ce sport est remplie de très bons joueurs qui n’ont jamais connu le Graal en Grand Chelem (Montgomerie, Westwood, Donald, …), de ceux qui l’ont connu mais ont disparu presque aussi vite mais surtout de ceux qui ont dû persévérer longtemps pour enfin éclore à la face du monde. Le golf est assurément un sport de patience. A nous, supporters français de l’être aussi, encore.